Réaction aux propos de KKB (1ère partie)
"le maire étant le nom européen du chef du village (...... ), pour qu’il y ait la cohésion et l’harmonie dans la cité, que dans chaque zone, ce soit des propriétaires terriens qui gèrent la mairie" ( publié par le site www.lebanco.com1)
Le professeur Kakou Guikahué, commentant une
déclaration du député de Port-Bouet et président de la jeunesse
du PDCI M. Koudio Konan Bertin alias KKB a dit : « Et
il (ndr KKB) est allé plus loin pour dire que les postes de députés
étant une représentation nationale, que des communautés qui ont
émigré vers d’autres cieux, si on dit de partager les postes de
députés, lui n’y voit pas d’inconvénient. Cependant, il trouve
que le maire étant le nom européen du chef du village. Alors il
aurait souhaité, pour qu’il y ait la cohésion et l’harmonie
dans la cité, que dans chaque zone, ce soit des propriétaires
terriens qui gèrent la mairie pour éviter des frustrations. Il a
dit que pour la libation, chaque peuple a sa façon de faire. Chez
les Gouro, les Bété, les Baoulé, les Malinké etc. chacun a sa
façon et sa période de libation. Et il (KKB) a ajouté que "nous
les Baoulé, nous avons beaucoup bougé à travers le pays. Nous
sommes partout. Ce n’est pas parce que nous sommes nombreux à Oumé
que nous allons revendiquer le poste du maire d’Oumé. Si nous
prenons tous les postes, les Gouro ne vont pas vouloir faire la
libation. Ils risquent même d’invoquer les mânes contre vous et
tout ce que vous aller entreprendre va échouer". Ce qui
signifie pour lui que pour qu’il ait la cohésion sociale et le
développement, il faut que ce soit un fils de la région qui soit
maire, par contre pour les députations, tout le monde peut être
député, parce qu’on n’est pas député d’une circonscription,
mais de la Nation. »
C'est
une déclaration très grave; il faut cependant admettre le courage
de KKB de dire haut ce que beaucoup d'Ivoiriens pensent tout bas. La
question ethnique, puisque de cela qu'il s'agit, a causé beaucoup de
préjudices à notre pays, c'est pourquoi il me semble important de l'aborder avec du tact, surtout quand il s'agit d'un responsable politique. Je ne suis cependant pas de ceux qui pensent résoudre cette question importante pour la paix en Côte d'Ivoire simplement en tirant à boulets rouges sur notre jeune frère KKB et ignorer la réalité socio-culturelle qu'elle incarne. Résoudre un
problème commence d'abord par reconnaitre son existence.
Les
remarques de KKB mettent en relief une question de fonds :
quelle Côte d'Ivoire voulons-nous ? Est-ce une fédération de
régions déterminées par les ethnies y habitant avant la
colonisation ? Est-ce une république avec des citoyens égaux
devant la loi, en droits et en devoirs sur toute l'étendue de ses
322 mille km carrés ? Le statut d'Ivoirien doit-il être
défini à partir de « son village d'origine » comme le
voulait feu Boga Doudou ou à partir de sa nationalité tel que
définie par le code de la nationalité ? Ce sont là des
questions fondamentales auxquelles nous devons rependre. Plutôt que
de brûler KKB, il appartient à ceux d'entre nous qui ne partageons
pas son point de vue de le confronter avec arguments contre
arguments, sans hypocrisie.
Une société d'êtres humains ne
saurait être figée comme une photo car elle est dynamique par
essence et son organisation doit épouser cette dynamique, c'est pour
cela que je trouve cette vision de KKB étroite, inadéquate et complètement en
déphasage avec ce monde globalisé dans lequel nous vivons.
En
jetant un bref regard sur ce qu'est la Côte d'Ivoire, on constate
tout simplement qu'elle n'existait pas avant la colonisation
Française. Il y avait certes des peuples habitant l'espace
géographique connu aujourd'hui sous le nom de Côte d'Ivoire. La
France a morcelé les terres Africaines conquises au bout des canons
et les a morcelé selon ses intérêts, y a mis une administration, y a bâti des
infrastructures, crée un système d'enseignement, y a apporté une autre culture dans une langue qui est devenue notre langue nationale. Toutes ces actions ont eu pour conséquence
des mouvements de populations parfois forcés, parfois volontaires.
Nous disons alors que la Côte d'Ivoire est le fruit de tout ce passé
colonial. Faire émerger une culture au sens large du terme, comprenant entre autre le mode de choix de ses représentants en puissant dans les traditions est une bonne chose, en faire la norme au mépris de l'histoire en est une autre.
1 http://www.lebanco.net/news/lebancoprint.aspx?id=17555